27.06.24

Le Conseil d'Etat précise la manière de vérifier le respect des règles de hauteur consacrées par le RRU et annule le permis délivré par la Région à Skyline Europe pour la construction de trois immeubles dont une tour R+12 à Evere

C.E., asbl Bourg-Lombaerde et environs e.a., n° 260.289

Le Conseil d'Etat a annulé le permis délivré à Skyline Europe concernant la démolition d'immeubles de bureaux rue Colonel Bourg (le long de l'E40) et la construction d'un ensemble de 111 appartements au-dessus d'un parking en sous-sol réaménagé, répartis sur trois immeubles dont une tour de R+12 étages.

Cet arrêt présente un intérêt certain en ce qui concerne l'appréciation du respect de l'article 8 du Titre Ie du règlement régional d'urbanisme (RRU) qui régit la hauteur des constructions et de la nécessité d'obtenir une dérogation.

Aux termes de l'article 8, § 1er, du RRU, la hauteur des constructions ne peut dépasser la moyenne des hauteurs des constructions sises sur les terrains qui entourent le terrain considéré, même si cet ensemble de terrains est traversé par une ou des voiries.

Dans leur recours, les requérants représentés par Vincent Letellier, faisaient valoir que la Région n'avait pas valablement apprécié le respect de cette disposition parce que :

  •   la hauteur des constructions en projet et la moyenne des constructions qui l'entourent n'avait pas été calculées en mètres mais en nombre d'étages;
  • il n'avait pas été tenu compte des étages techniques des constructions en projet, ce qui en réduisait articifiellement la hauteur;  
  • le calcul de la hauteur moyenne des constructions sur les terrains qui entourent le projet était faussé par la prise en considération d'immeubles se trouvant de l'autre côté de l'autoroute et qui, de ce fait, ne font pas partie du voisinage ou du même ensemble urbain que celui de la rue Colonel Bourg;
  • le calcul de la hauteur  moyenne des constructions autour du projet était également faussée par l'omission de l'immeuble le moins élevé...

 

Le Conseil d'Etat constate que les critiques sont fondées. En effet, il retient que si l'article 8 du Titre Ier du RRU ne contient aucune indication relative à ce qu'il convient d'entendre par hauteur d'un bâtiment, il convient de se référer au sens usuel des termes, selon lequel la hauteur d'une construction est celle de son point le plus élevé et est mesurée en mètres par référence au niveau du terrain. La hauteur ne peut donc être déterminée par le nombre de niveaux, ceux-ci pouvant d'ailleurs présenter des hauteurs différentes en lien avec l'organisation des volumes à l'intérieur des bâtiments.

Les hauteurs doivent donc être calculées en mètres et il convient d'intégrer les étages techniques.

Ensuite, le Conseil d'Etat constate que l'article 8 du RRU ne précise pas non plus ce qu'il convient d'entendre par "les terrains qui entourent le terrain considéré, même si cet ensemble de terrains est traversé par une ou des voiries". Toutefois, cette disposition est complétée par un schéma qui montre que les terrains qui jouxtent le terrain considéré, ceux qui n'y touchent que par un angle, et ceux qui en sont situés à proximité immédiate de l'autre côté de la voirie en font partie, de même qu'un terrain situé juste au-delà de cet-ci.

Enfin, le Conseil d'Etat affirme le principe selon lequel si l'autorité délivrant le permis dispose d'une marge d'appréciation dans l'octroi des dérogations au regard de l'intégration du projet dans son environnement bâti avoisinant et peut, dans ce cadre, avoir égard à la situation générale des lieux et à des dimensions d'immeubles un peu plus éloignés, elle est tenue en revanche de respecter les conditions fixées à l'article 8 lorsqu'il s'agit de vérifier si le projet est dérogatoire quant à la hauteur des bâtiments qu'il prévoit.

Constatant qu'à cet endroit, l'autoroute qui sépare le projet des constructions les plus hautes présente au moins sept bandes de circulation et des bandes arborées, le Conseil d'Etat relève que cette situation ne correspond pas au schéma figurant à l'article 8 du RRU, de sorte qu'il est permis de douter que ces constructions se trouvent sur des "terrains qui entourent le terrain considéré, même si cet ensemble de terrains est traversé par une ou des voiries", au sens de l'article 8, soit sur des terrains situés à proximité immédiate.

Le Conseil d'Etat sanctionne également l'absence de prise en considération d'un bâtiment situé juste en face du projet qui, lui, présente une faible hauteur.

 

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